Ce que vos mots disent de votre douleur : le rôle des métaphores dans la douleur chronique

Comment les métaphores influencent la perception et la régulation de la douleur chronique

Avez-vous déjà prêté attention à la manière dont vous parlez ou décrivez votre douleur ? Les mots que nous utilisons ont un pouvoir bien plus grand que nous ne le pensons, en particulier lorsqu’il s’agit de la douleur chronique neuroplastique. Une étude récente publiée dans la revue Pain Medicine a mis en lumière comment les métaphores que nous utilisons influencent non seulement l'intensité de la douleur, mais aussi notre capacité à y faire face émotionnellement.

La relation entre métaphores et douleur

Longtemps j’ai décrit ma douleur comme un coup de poignard dans le dos. Qui n’a pas cherché de solutions pour “lutter contre sa douleur”, mettre fin “à ce carcan”...

Lorsque je lis les messages de personnes souffrant de douleurs chroniques, je suis frappée du champ lexical anxiogène, dur et désespéré qu’elles utilisent. “Je me déteste. Pas parce que je souffre mais parce que je suis incapable de combattre ma douleur.” “Ce n’est pas un microbe, ou un virus, je ne pourrai jamais aller mieux”, “Mon corps est comme un château de cartes”....

L'étude du Pain Medicine a exploré l'impact de différentes métaphores utilisées pour décrire la douleur chronique. Voici ce que les chercheurs ont trouvé :

🔹 Combattre la douleur : Cette métaphore guerrière, où la douleur est perçue comme un ennemi à combattre, est associée à une augmentation de l'intensité de la douleur et à un stress émotionnel accru. Lorsque nous considérons la douleur comme une "bataille", elle devient quelque chose de redouté et de constant, une force qui lutte contre nous.

🔹 Naviguer à travers la douleur : En revanche, des métaphores comme "naviguer à travers la douleur" ont montré des effets bénéfiques. En reformulant la douleur de cette manière, nous sommes invités à voir notre expérience comme un voyage, une traversée, où nous avons la possibilité de diriger notre vie avec la douleur. Cette approche réduit la perception dramatique de la douleur et favorise l'émergence de stratégies d'adaptation plus efficaces, contribuant ainsi à la reprogrammation des voies neuronales qui soutiennent la douleur.

Pourquoi la manière dont vous choisissez de parler de votre douleur est importante ?

Les métaphores sont puissantes. Elles ne se contentent pas de décrire une réalité, elles créent une réalité. Le langage que nous utilisons pour parler de notre douleur influence notre perception de celle-ci, mais aussi notre réponse émotionnelle et nos comportements. Adopter des métaphores plus positives et plus flexibles peut aider à réduire la souffrance et à renforcer notre capacité à faire face.

La douleur chronique, notamment les douleurs chroniques neuroplastiques, peut parfois sembler insurmontable. Mais plutôt que de se concentrer sur une confrontation incessante, voire sans issue, envisager la douleur comme un voyage à travers lequel nous apprenons à évoluer, à nous adapter et à découvrir de nouvelles ressources en nous-même peut profondément changer notre expérience de cette souffrance. Reprogrammer les voies neuronales implique justement cette capacité à reconfigurer notre réponse à la douleur, en changeant la manière dont notre cerveau perçoit et interprète les signaux de douleur.

Reprogrammer sa douleur : quelques conseils pratiques

  1. Remplacer les métaphores négatives : Si vous avez l'habitude de décrire votre douleur comme une "bataille" ou une "lutte", essayez de reformuler votre manière de vous exprimer. En choisissant volontaire des expressions plus légères voire pourquoi pas amusantes, vous pouvez réduire la tension émotionnelle liée à la douleur et prendre de la distance par rapport à elle.

  2. Se concentrer sur l'accompagnement de la douleur : Plutôt que de chercher à éliminer la douleur, demandez-vous : "Comment puis-je mieux naviguer avec elle ?". Cela vous amène à adopter une approche plus douce et plus compréhensive, moins centrée sur la lutte.

  3. Pratiquer la pleine conscience : En observant simplement votre douleur sans jugement, vous permettez à votre corps et votre esprit de se relâcher. Cela crée une nouvelle dynamique, où la douleur ne vous contrôle plus, mais où vous devenez plus apte à en gérer les fluctuations.

    Conclusion

    Ce que cette étude nous montre, c'est qu'en changeant notre regard sur la douleur via le langage que nous employons pour la décrire, nous pouvons réellement transformer notre expérience de la douleur. Reprogrammer les voies neuronales implique de réécrire les circuits qui maintiennent la douleur, de déconstruire les schémas qui nous y enferment. Et parfois, un simple changement de mot peut ouvrir la voie à une gestion de la douleur plus saine, plus sereine et plus efficace.

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